Photo titre : L’ex vice-présidente du Parlement européen, l’Italienne Luisa Morgantini, à un poste frontière de Rafah, entre la bande de Gaza et l’Égypte, le 9 juin 2009. © AFP PHOTO/ SAID KHATIB
En délégation dans le sud-est de Hébron, en Cisjordanie occupée, l’infatigable militante pacifiste italienne, et ex-vice-présidente du Parlement européen, a été arrêtée, ce 30 janvier, à Masafer Yatta. La localité palestinienne est la cible régulière des attaques de colons et de l’armée d’occupation.
Arrêtés ce 30 janvier par l’armée israélienne dans la localité de Tuba (Cisjordanie occupée), l’ancienne vice-présidente italienne du Parlement européen, Luisa Morgantini (Refondation communiste), âgée de 84 ans, et le journaliste Roberto Bongiorni du quotidien Il Sole 24 Ore ont été libérés en fin de journée de la caserne située au cœur de la colonie de Kiryat Arba où ils étaient détenus.
Le militant palestinien du mouvement Youth of Sumud, qui les accompagnaient, et leur chauffeur, sont restés plus longtemps aux mains de l’occupant avant d’être finalement relâchés quelques heures plus tard. C’est également le cas des militants néerlandais, israélien et palestinien qui composaient la mission.
Accusée d’entrer dans une zone militaire israélienne, la délégation devait rencontrer, sur place, les habitants régulièrement pris pour cible par les colons israéliens armés. « Luisa est une icône de la justice – j’exhorte les autorités israéliennes à la libérer immédiatement, ainsi que les personnes qui l’accompagnent. Israël n’a aucun droit de se trouver en Cisjordanie ou dans toute autre partie du territoire palestinien occupé – et encore moins d’arrêter des défenseurs des droits de l’homme ! Assez », a immédiatement réagi Francesca Albanese, rapporteuse spéciale des Nations unies sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens, à l’annonce de l’arrestation.
Un harcèlement quotidien
De son côté, l’association AssoPace Palestine, dont Luisa Morgantini est membre, a estimé que ces arrestations illustraient « la répression féroce de la dissidence et (les) pratiques d’intimidation (de l’armée d’occupation), dans un contexte de répression continue et de violation des droits fondamentaux des Palestiniens dans les territoires palestiniens ».
Il y a quelques jours, un village des environs de Tuba, près de Hébron, a ainsi été violemment pris d’assaut. Ce harcèlement n’est pas nouveau : l’incendie de maisons ou les agressions visant les bergers constituent le lot quotidien de la population palestinienne. En octobre dernier, des colons avaient ainsi kidnappé un adolescent dans un autre village des environs. Pour pouvoir mettre la main sur de nombreuses agglomérations rurales, expulser les Palestiniens et favoriser la colonisation, l’armée a fait de la région de Masafer Yatta, une zone d’entraînement militaire.
Infatigable militante de la paix, originaire du Nord de l’Italie, Luisa Morgantini a dédié sa vie à la résolution des conflits par le dialogue en ex-Yougoslavie, en Afghanistan et au Moyen-Orient. « Je ne suis pas naïve, les négociations sont extrêmement difficiles. Mais le dialogue est la seule manière d’en finir avec la guerre et la terreur », dit-elle. Au Parlement européen, où elle a été élue en 1999 en tant que candidate indépendante, comme lors de conférences internationales, elle s’est toujours attachée à faire part de son expérience de terrain, douée de la sensibilité qui la caractérise. En mettant, l’humain au centre comme un legs de son père, partisan pendant la Seconde guerre mondiale, qui combattit les barbaries fascistes et nazies.
Depuis 1982, elle dédie son temps à l’initiative des Femmes en noir lancée durant la première Intifada, qui réunit des Israéliennes et des Palestiniennes pour la fin de l’occupation. La casquette d’ancienne syndicaliste de la Fédération des travailleurs de la métallurgie italienne n’est jamais loin. Elle a ainsi mis de nombreux projets de solidarité sur pieds en Amérique du Sud et en Afrique. C’est ce qu’elle appelle la « solidarité en pratique ».
L’Humanité – Lina Sankari – 31 janvier 2025
